Le guide de valorisation des sables de fonderie en technique routière est paru en 2019. Ce document a vu le jour sous l’action commune de la Fédération Forge Fonderie, du CEREMA et du CTIF. Le secteur de la fonderie génère annuellement environ 350 000 de tonnes de déchets de sable dont les deux tiers environ pourraient être valorisés en technique routière selon des usages particuliers.
Pourquoi un tel guide ?
Depuis l’arrêté du 16 juillet 1991, les sables de fonderies sont considérés comme des déchets destinés à être entreposés en centre technique d’enfouissement. Si ce même arrêté ouvrait la voie à une valorisation de ces déchets sous forme de remblais, les faibles exigences d’analyses demandées (uniquement sur la concentration en phénol) rendaient ce type de valorisation risquée. Cela n’a pas empêché certains usages en TP depuis notamment les années 2000. Toutefois on assiste actuellement à la montée en puissance de l’économie circulaire, la fermeture progressive d’un certain nombre de centres d’enfouissement technique posant des problèmes de débouché pour les déchets de sable et la remontée progressive des TGAP déchet. Tous ces facteurs précédemment évoqués nécessitaient une clarification réglementaire et technique pour promouvoir plus largement la valorisation en technique routière. Et ce d’autant que le SETRA avait ouvert la voix en 2011 en produisant un guide méthodologique pour définir l’acceptabilité environnementale de l’usage de matériaux alternatifs en technique routière.
Objectif du guide de valorisation des sables de fonderie
Ce guide d’application a pour objet de fournir les spécifications opérationnelles concernant l’acceptabilité environnementale de matériaux alternatifs élaborés à partir de déchets de sable de fonderie en technique routière. Il ne s’applique qu’aux matériaux alternatifs et routiers fabriqués à partir des gisements de sables de fonderie. Il fournit les obligations des différents acteurs d’un projet routier en vue d’assurer la traçabilité des chantiers ayant recouru à leur utilisation.
Ce guide d’application s’adresse à différents acteurs industriels : aux entreprises de fabrication et d’application (pour qu’elles puissent proposer des matériaux alternatifs et routiers dans le respect des dispositions du présent guide), aux exploitants de fonderies afin de leur permettre de répondre aux obligations réglementaires en matière de gestion de leurs déchets (hiérarchie des modes de traitement, traçabilité, recours à des filières adaptées, …), aux maîtres d’ouvrage et maîtres d’œuvre qui souhaitent utiliser ces matériaux alternatifs en technique routière afin qu’ils intègrent dans leurs projets et appels d’offres les modalités adaptées et enfin à l’inspection des installations classées pour qu’elle puisse y trouver les dispositions adaptées concernant le recyclage des sables de fonderie en technique routière.
Les différents types de déchets de sable
Les déchets de sable concernés sont ceux générés par les fonderies mettant en œuvre des procédés de moulage et/ou noyautage avec du sable, de décochage et dessablage des pièces de fonderie, de recyclage ou régénération du sable. Le guide défini plus particulièrement 3 types de déchets de sables concernés : tout d’abord les noyaux et moules de fonderie de métaux ferreux/non ferreux, ayant subi la coulée, ne contenant pas de substances dangereuses (code déchet 10 09 08 / 10 10 08) puis les noyaux et moules de fonderie de métaux ferreux/non ferreux, n’ayant pas subi la coulée, ne contenant pas de substances dangereuses (code déchet 10 09 06 / 10 10 06) et enfin dans le cas de fonderies de grande taille, les sables issus des opérations de dessablage de pièces de fonderie, peuvent être gérés séparément avec une rubrique différente : la rubrique 12 01 17 (déchets de grenaillage ne contenant pas de substances dangereuses). On portera une attention particulière aux fines. En effet, ce n’est pas indiqué dans le guide, mais si elles sont extraites séparément des déchets de sables, elles ne peuvent faire l’objet d’une valorisation en technique routière et risquent de polluer et d’empêcher de valoriser les déchets avec lesquelles elles se retrouveraient mélangées.
Responsabilité de la fonderie
L’exploitant de la fonderie – au sens du code de l’environnement – producteur des déchets de sable est, à ce titre, responsable de leur gestion jusqu’à leur élimination ou valorisation finale, même lorsqu’il décide de faire assurer tout ou partie de cette gestion par un tiers (article L.541-2). Il a notamment pour obligations de mettre les moyens nécessaires afin que leur gestion se fasse sans mettre en danger la santé humaine et sans nuire à l’environnement, y compris en organisant leur transport (article L.541-1) puis caractériser les déchets de sables de fonderies générés (article L.541-7-1). En particulier, il doit détecter la présence de substances dangereuses (BTEX, phénols, métaux…).
Enfin, il doit communiquer les informations concernant l’origine, la nature, les caractéristiques et les quantités des déchets de sable de fonderie qu’il décide de remettre à un tiers (article L.541-7). Pour répondre à ses obligations, l’exploitant de la fonderie réalise une analyse complète de ses sables de fonderie permettant de les classer, et fournit à l’installation de recyclage toutes les informations nécessaires à l’obtention d’un Certificat d’Acceptation Préalable (CAP), conformément aux prescriptions de son arrêté préfectoral. A noter que la fonderie peut exploiter elle-même l’installation de recyclage du sable (avec les opérations et autorisations décrites au chapitre suivant).
Acceptation des déchets de sable de fonderie sur les installations de recyclage
Une installation de recyclage, qu’elle soit fixe ou mobile, permanente ou temporaire, relève en général des rubriques de la nomenclature ICPE suivantes : 2515 (traitement de déchets inertes), 2517 (stockage et transit de déchets inertes) et 2791 (traitement y compris biologique de déchets non dangereux) et 2716 (stockage et transit de déchets non dangereux) des ICPE. Selon qu’elle relève du régime déclaratif, d’enregistrement ou d’autorisation, l’autorisation administrative – le cas échéant le ou les arrêtés types applicables – fixent les prescriptions ainsi que les modalités de protection de l’environnement (bruit, poussière, paysage, lutte contre les pollutions des eaux et/ou des sols, vibrations, ….). Dès lors que l’installation de recyclage traite plus de 100 t/j de déchets non inertes, elle est soumise à la Directive IED (Industrial Emission Directive) avec le numéro 3532.
Les documents d’accompagnement remis par le producteur de déchets de sable de fonderie permettent à l’exploitant de l’installation de recyclage de disposer de tous les éléments d’appréciation nécessaires relatifs à la possibilité d’accepter le matériau sur son installation notamment concernant son origine, sa nature, ses caractéristiques et la quantité concernée.
S’il le juge nécessaire, l’exploitant de l’installation de recyclage effectue, à son initiative, toutes analyses – complémentaires ou contradictoires – lui permettant d’apprécier la possibilité d’admettre le chargement sur son site. Au vu des éléments fournis et des contrôles effectués, l’exploitant de l’installation de recyclage accepte ou refuse le chargement.
Dans le cas d’un regroupement de déchets de sable de fonderie, les sables de fonderie sont gérés distinctement selon l’appartenance à la catégorie de procédé de moulage mis en œuvre par la fonderie : catégorie 1 (sables à vert ou argileux), catégorie 2 (sables à prise chimique basique : polyuréthane, alphaset, inorganique, croning…) et enfin catégorie 3 (sables à prise chimique acide : furanique et phénolique essentiellement).
Élaboration du matériau alternatif
Les sables doivent subir un certain nombre de traitements mécaniques pour être transformés en matériaux à usage routier dont les caractéristiques doivent être conformes aux normes et/ou spécifications d’usage en vigueur (normes produits, normes d’usages, guides techniques régionaux, …) et aux spécifications opérationnelles environnementales consignées dans le présent guide pour le type d’usage routier envisagé. Dans le cas d’une plateforme de regroupement, l’élaboration du matériau alternatif (ou recyclage du sable de fonderie) se fait par catégorie de procédé de moulage définie plus haut (sable à vert/sable à prise chimique acide/sable à prise chimique basique).
Grâce à des équipements adaptés, le déchet de sable de fonderie est transformé en un matériau alternatif calibré et contrôlé, exempt d’éléments indésirables. Les refus susceptibles d’être générés au stade de cette phase d’élaboration sont considérés comme des déchets d’activités.
Les différentes étapes de l’élaboration peuvent consister en l’extraction des éléments métalliques à l’aide de séparateurs magnétiques (les métaux ainsi récupérés sont recyclés dans les filières adaptées), l’extraction des éléments indésirables (papier, bois, plastique, …) par des équipements de tri (manuel, aéraulique, hydraulique, …), le calibrage par concassage/criblage afin de produire un matériau élaboré compatible avec les utilisations finales envisagées, la floculation des argiles ou encore le traitement biologique des sables.
Les matériaux alternatifs sont ainsi élaborés afin d’obtenir des matériaux routiers pour des usages en remblai, en couche de forme (sol, grave non traitée), en assise de chaussée (grave non traitée, granulat) et/ou en couche de roulement. Ces matériaux alternatifs peuvent être utilisés seuls en tant que matériaux routiers. Toutefois, pour étendre leurs domaines d’emplois en technique routière, ils peuvent être utilisés en mélange avec d’autres matériaux et/ou traités aux liants hydrauliques ou hydrocarbonés.
Domaine d’emploi des matériaux alternatifs
Trois types d’usages sont répertoriés dans le guide. Tout d’abord un usage de type 1 qui regroupe les remblais sous ouvrage, les couches de forme, les couches de fondation et les couches de base et couches de liaison. Puis un usage de type 2 pour lequel est spécifié des usages d’au plus six mètres de hauteur en remblai technique connexe à l’infrastructure routière (ex : merlon de protection phonique ou paysagé) ou en accotement, dès lors qu’il s’agit d’usages au sein d’ouvrages routiers recouverts (au moins 30 cm de matériaux naturels ou équivalent avec une pente d’au moins 5% en tout point de l’enveloppe extérieure) et des usages de plus de trois mètres et d’au plus six mètres de hauteur en sous-couche de chaussée ou d’accotement d’ouvrages routiers revêtus.
Et enfin un usage de type 3 : en sous-couche de chaussée ou d’accotement, au sein d’ouvrages routiers revêtus ou non revêtus, en remblai technique connexe à l’infrastructure routière (ex : merlon de protection phonique ou paysagé) ou en accotement, au sein d’ouvrages routiers recouverts ou non recouverts, en couche de roulement, en remblai de pré-chargement nécessaire à la construction d’une infrastructure routière, en système drainant (ex : tranchée ou éperon drainant, chaussée réservoir). Rentrent également dans cette catégorie l’utilisation de matériaux routiers pour la construction de pistes de chantier, de routes forestières, de chemins d’exploitation agricole ou encore de chemins de halage. Les usages routiers de type 3 ne font l’objet d’aucune restriction d’épaisseur de mise en œuvre.
Limitations d’usage liées à la mise en œuvre du matériau routier
Des limitations d’usage de ces matériaux alternatifs sont définies dans le guide pour deux raisons. Tout d’abord, il s’agit de limiter le volume et la durée des stockages temporaires durant les chantiers de mise en œuvre, dans la mesure où l’exposition des matériaux aux eaux météoriques peut être plus importante à ce moment. Ensuite, il y a lieu de limiter l’usage à proximité d’environnement fortement exposé à l’eau et nécessitant l’avis d’un expert hydrogéologue pour s’affranchir de cette limitation. Ainsi, pour les usages de type 1 et 2, et sauf avis contraire d’un hydrogéologue-expert, l’utilisation des matériaux alternatifs est interdite par exemple (liste non exhaustif) dans les zones inondables et à moins de 50 cm des plus hautes eaux cinquantennales ou à moins de 30 m de tout cours d’eau, y compris lacs et étangs.
On peut citer également une interdiction d’utilisation dans les périmètres de protection rapprochée (PPR) des captages d’alimentation en eau potable (AEP) ou dans les parcs nationaux. Toujours pour les usages de type 1 et 2, il y a une limitation liée à la mise en œuvre car la capacité de stockage temporaire sur chantier est limitée à 1000 m3 et nécessite au-delà de 1000 m3 sur chantier l’avis d’un hydrogéologue-expert.
Traçabilité lors d’une cession de matériau routier
Le guide définit aussi le minimum requis en matière de traçabilité. Ainsi, toute cession, accompagnée ou non d’une vente, de matériau routier est accompagnée d’un bon de livraison émis par l’exploitant de l’installation de recyclage. Chaque bon mentionne au minimum : le nom et l’adresse de l’entreprise chargée de l’exécution des travaux routiers, le nom des transporteurs, si le transport n’est pas effectué par l’entreprise chargée de l’exécution des travaux routiers, la quantité de matériau routier quittant l’installation et enfin la date de sortie de l’installation. En sus du bon de livraison, avant la livraison sur le chantier routier ou au moment de celle-ci, ou lors de la première d’une série de livraisons d’un même matériau routier, l’exploitant de l’installation de recyclage fournit à son client (en général l’entreprise chargée de l’exécution des travaux routiers) une fiche d’information.
Celle-ci indique les usages routiers autorisés compte tenu des caractéristiques environnementales des matériaux alternatifs entrant dans sa composition et les restrictions d’usages associées. Dans tous les cas, l’exploitant de l’installation de recyclage tient à la disposition de son client les résultats de la vérification de la conformité environnementale pendant une durée de trois ans. Ces dispositions n’exonèrent pas l’exploitant de l’installation de recyclage du respect des autres obligations réglementaires auxquelles il est soumis.
Autres exigences du guide de valorisation des sables
Le guide définit d’autres exigences (pour lesquelles nous vous renvoyons à sa lecture). Il s’agit notamment des exigences de système qualité, des méthodes d’échantillonnage du sable à analyser et des normes à respecter par le laboratoire d’analyse.
Conclusions
Ce guide de valorisation des sables de fonderie définit ainsi des règles d’utilisation claires des sables de fonderie en techniques routières en fonction du type d’usage. Il est à même de permettre le développement de filières de valorisation des sables de fonderie et ainsi participer à l’économie circulaire (les extrants d’une industrie devenant les intrants d’une autre).