
Méthodologie de simulation numérique - de la CAO a la simulation remplissage solidification.
La simulation numérique est devenue de nos jours un outil indispensable. Pour faire face à la concurrence internationale, les fondeurs ont un souci permanent de gain de productivité qui s’exprime par une volonté de gagner en coût, en délai et en qualité. La simulation numérique offre en effet la possibilité de représenter des phénomènes physiques que la coulée réelle ne permettra pas de mettre en évidence. Elle donne des indications importantes sur les phases de remplissage et de solidification, ainsi que sur les échanges thermiques moule-métal. Au stade de l’avant-projet, ces informations seront analysées afin d’optimiser et de valider la conception des outillages. En production, le logiciel pourra être utilisé afin de mieux comprendre l’apparition des défauts et ainsi y remédier.
Intégrer la simulation numérique en fonderie
D’un point de vue économique, la mise en place de tels logiciels est devenue possible grâce à l’amélioration des performances des processeurs et la baisse du prix du matériel informatique. De plus, les progrès réalisés en CAO ces dernières années, au niveau des numérisations des géométries et des interfaçages avec les codes de calcul, ont réduit les délais d’une étude. Les modèles théoriques évoluent, toujours plus complexes et plus précis et prennent en compte des domaines très spécifiques comme la prévision de la microstructure des fontes, la thixocoulée ou l’injection de fluides compressibles, le calcul des déformations ou les contraintes résiduelles (thermomécanique). Ce dynamisme, les efforts de recherche consentis, ainsi que des exemples d’intégration réussie, poussent actuellement de nombreuses fonderies à réfléchir sur l’acquisition d’un tel équipement.
Définition de la géométrie

Cartes thermiques en fonderie – simulation numérique.
Le travail de simulation commence toujours par la définition de la pièce à produire, et de sa forme géométrique. Si la construction existe déjà en CAO, quel que soit le logiciel utilisé, il est nécessaire de pouvoir réaliser une passerelle de façon à permettre la saisie du fichier CAO dans le programme de simulation. La performance d’un outil de simulation pourra être jugée par son aptitude à lire correctement des données CAO. Aujourd’hui si de nombreux formats d’échange standard sont disponibles sur le marché (IGES, STEP, STL, PARASOLID, …), l’interface du logiciel de simulation devra être capable de récupérer la totalité de la géométrie transférée (dans un format d’échange standard ou un format natif du logiciel de CAO) ou éventuellement disposer d’outils automatiques de correction topologique des surfaces.
L’objectif à atteindre est d’éviter tout retour vers la CAO, lorsque des erreurs de géométrie sont constatées ou lorsque des modifications mineures sont à faire, car ceci risque de diminuer fortement la productivité du logiciel de simulation. Pour des modifications de géométrie, le pré-processeur du logiciel intégre généralement des « boites à outil » de créations d’entités géométriques simples, voire de modifications, ceci afin d’éviter tout aller-retour intempestif vers la CAO. Cette géométrie est importée, dans la plupart des cas, dans un format surfacique facettisé. On parlera alors de maillage surfacique. Cette représentation surfacique constituée de nœuds sur lesquels s’appuient des facettes triangulaires orientées est la condition nécessaire et suffisante pour décrire toute géométrie si complexe soit-elle. Cette définition servira de support à la création de domaines surfaciques sur lesquels seront appliquées des conditions initiales et des conditions aux limites du calcul, mais servira également au maillage volumique.
Le maillage volumique
Le maillage volumique est généré à partir de la définition surfacique précédente et consiste à décomposer en volumes élémentaires la pièce étudiée – généralement des petits cubes – parallélépipèdes rectangles ou tétraèdres. Le maillage est une étape importante et relativement complexe dans le processus du calcul numérique. L’utilisateur dispose de mailleurs automatiques avec lesquels il aura la possibilité de définir une stratégie de maillage. En effet, on aura intérêt à économiser du maillage dans les zones dites secondaires et au contraire à utiliser des éléments très fins au voisinage des interfaces ou des zones à forts gradients de température.
Il existe deux grandes familles de maillage : les maillages non structurés qui s’appuient sur la méthode de résolution des éléments finis (FEM), et les maillages structurés, qui s’appuient sur les méthodes des volumes finis (FVM) ou différences finis (FDM).
Maillages non-structurés

Maillage structuré grappe en fonderie sous pression aluminium.
La principale caractéristique d’un maillage non-structuré est que la connectivité est explicite, c’est à dire écrite « en dur » dans un fichier. Chaque élément est ainsi défini explicitement par son tableau de connectivité de nœuds : une liste de nœuds par élément. Chaque nœud est donc défini ici par un triplet de coordonnées (x, y, z) et par un numéro.
Ce type de maillage est couramment utilisé en calcul de mécanique des structures avec la technique des éléments finis, car il a l’avantage d’avoir une grande flexibilité pour des géométries complexes et de pouvoir être raffiné localement de manière très facile. Certains mailleurs non-structurés peuvent fonctionner comme de véritables « boîtes-noires » où l’on indique la géométrie à mailler ainsi que le nombre de nœuds que l’on souhaite pour le calcul. Celui-ci produit alors un maillage « près à l’emploi » avec une possibilité de raffinement en cours de calcul. Il s’agit d’un maillage auto-adaptatif de type Delaunay qui permet au cours du calcul de renforcer le maillage aux endroits de forts gradients, dans les zones où il existe des variations importantes de résultats.
Maillages structurés

Problème de raffinement dans un maillage structuré en volumes finis.

Maillage structuré d’une pièce (fonderie sous pression aluminium) avec talons de lavage et partie du système d’alimentation.
Le maillage structuré, quant-à-lui, possède une connectivité implicite, c’est à dire déduite. Chaque élément est alors défini implicitement: après le rang i, vient le rang i+1. Il n’y a donc pas de tableau de connectivité. Chaque nœud est défini par un triplet de coordonnées (x, y, z) et par un triplet d’indices (i, j, k). Du fait d’une connectivité implicite, ce type de maillage est moins gourmand en mémoire car on doit y charger seulement une matrice de coordonnées et une gestion intelligente de la mémoire permet de ne pas avoir à charger les indices car le maillage possède une structure. Il est plus facile à contrôler dans la régularité des mailles. En effet la taille d’une maille ne doit pas varier trop rapidement d’une maille à l’autre.
La précision du résultat étant liée à la résolution du maillage, on va s’efforcer de rendre celui-ci aussi fin que possible dans les régions qui comportent des variations importantes dans les grandeurs physiques. Ceci pose un problème lorsque l’on veut réaliser un raffinement local pour permettre d’augmenter la précision d’un phénomène intéressant.
La mise en données
L’étape de mise en données d’un processus de coulée fait appel à plusieurs disciplines : à la métallurgie des alliages liquides et solides pour la définition des paramètres thermophysiques des matériaux, à la connaissance des procédés de fonderie couplée à la connaissance des principes généraux de la thermique et de l’hydraulique avec le recul du « numéricien » pour la définition des conditions initiales et aux limites de calcul (hypothèses de calcul).
Données thermo-hydrauliques des matériaux mis en oeuvre

Méthodologie de simulation numérique en fonderie.
Ces données matériaux constituent en quelque sorte la base de connaissance de l’outil de simulation numérique. Les données thermophysiques nécessaires à une simulation de remplissage et de solidification sont nombreuses et certaines sont variables en fonction de la température (t°C). On distingue ainsi généralement les températures solidus, eutectique, liquidus, la chaleur latente, la chaleur spécifique (t°C), la masse volumique (t°C), la fraction solide (t°C), la conductivité thermique (t°C), l’enthalpie massique (t°C), la viscosité dynamique et cinématique (t°C), .…
Il est nécessaire de bien comprendre que la plupart de ces paramètres varient avec la température (t°C), donc en cours d’évolution de la coulée. Des études sont d’ailleurs toujours en cours pour évaluer le niveau d’influence de chacun de ces paramètres sur les résultats d’un calcul de simulation. Dans certains cas, lorsque les données sont manquantes (alliage peu utilisé) ou que le degré de précision attendu est très importante, on pourra recaler les bases de données par des mesures expérimentales.
Les conditions initiales
Les conditions initiales sont les températures initiales du moule et de l’alliage liquide au début du processus de coulée ainsi que des champs de vitesses ou de pression métallostatique. Il faut traduire en termes numériques les conditions opératoires de la coulée. Dans les cas de moulage en coquille, par exemple, les températures initiales du moule peuvent être les conditions finales du cycle précédent.
Les conditions aux limites
La variété des méthodes de production (moulage en sable, en coquille, cire perdue, centrifugation, fonderie sous pression, …) et des matériaux mis en œuvre, nécessite l’introduction des caractéristiques liées au process. Il s’agît par exemple de prendre en compte le rayonnement et la convection à la surface extérieure du moule, ainsi que, le cas échéant, le refroidissement forcé en moules permanents par un dispositif de thermorégulation, mais également les résistances de contact aux interfaces (lames d’air, poteyages, …), l’utilisation de filtres, de refroidisseurs métalliques, de manchons exothermiques ou encore de tirages d’airs.
Les conditions aux limites vont permettre de définir – d’un point de vue numérique – l’environnement de la coulée d’une pièce. Il s’agit d’hypothèses numériques qui vont permettre à la fois de reproduire le phénomène physique et de mener à bien le calcul (convergence du calcul) ou d’en simplifier la résolution.
Le Solveur

Visualisation des résultats – logiciel de simulation numérique.
Les programmes de simulation pour les applications en fonderie doivent prendre en compte le plus complètement possible l’ensemble des lois physiques – thermique, hydraulique, changement de phase, … – en tenant compte de toutes les conditions aux limites et des conditions initiales. La simulation du remplissage et de la solidification d’une pièce de fonderie à l’aide d’un progiciel nécessite ainsi la description des différentes étapes par un modèle mathématique, qui intègre les principales lois physiques régissant ces différentes étapes.
Pour décrire d’un point de vue physique un process de fonderie, il est nécessaire d’établir quelques formulations fondamentales. Le remplissage en état turbulent par le métal liquide surchauffé ne peut être décrit que par la résolution des formules d’écoulement tri-dimensionnelles de Navier Stokes. On résoudra également des équations de continuité, de conservation de la masse et de la quantité de mouvement. Il faut ainsi coupler les équations d’écoulement avec celles de transfert de chaleur pour suivre les états de température du métal liquide dans le moule ou même avant le remplissage complet, pour déceler en certains points le front de solidification du métal en cours de remplissage. La solidification du métal liée au transfert de chaleur contenue, dans le moule ou son environnement, est décrite par les équations de la chaleur (équations de Fourier).
Ces logiciels résolvent, par des méthodes numériques (volumes finis, différences finies ou éléments finis), les équations physiques des phénomènes mis en évidence précédemment. La physique complexe du remplissage d’un moule et de sa solidification, liée à des géométries pièce le plus souvent très ouvragées, conduit automatiquement à des calculs mathématiques importants. Néanmoins, l’évolution des méthodes numériques, des techniques de programmation et des matériels informatiques repousse les limites du calcul permettant ainsi d’accéder à des résultats très rapidement. Les logiciels se doivent d’avoir une vocation industrielle, car s’il s’agit d’optimiser la géométrie d’une pièce ou les paramètres de coulée, plusieurs simulations peuvent être nécessaires dans une seule journée, et ce processus doit pouvoir remplacer ou raccourcir des campagnes d’essais longues et coûteuses.
L’utilisateur pourra également choisir une méthode de calcul (résolution simplifiée ou complète) en fonction du type de résultats qu’il attend ou des délais qui lui sont impartis. Au même titre que la discrétisation spatiale pour le maillage volumique, la qualité des résultats sera d’autant meilleure que la discrétisation temporelle sera fine au détriment, bien entendu, du temps de calcul qui peut devenir prohibitif.
Post-traitement – analyse des résultats

Remplissage d’un boitier en fonderie sous pression aluminium par un canal tangentiel.
Pour aider l’utilisateur dans l’analyse des résultats souvent longue et fastidieuse, les logiciels sont dotés de puissantes interfaces, avec notamment la possibilité de faire des sorties graphiques sous formes d’images ou d’animations. Le dépouillement des résultats doit se faire en trois dimensions avec possibilité de visualiser le « cœur de la matière » liquide ou solide (fonction x-ray) avec la possibilité de réaliser des coupes ou sections multiples. Il ne faut en effet pas perdre de vue que le but premier de la simulation numérique est de rendre la visualisation possible pour des analyses et des prises de décisions rapides.
Les logiciels de simulation donnent accès à la pression, à la température et à la vitesse en tout point de l’alliage, permettent de visualiser la progression du remplissage (surfaces libres) et de prévoir les risques de défauts d’écoulement. A partir des profils de température on obtient les contours de solidification et on peut prévoir les zones liquides isolées. L’utilisation efficace des techniques de simulation n’est réellement assurée que si les résultats des calculs sont disponibles à l’écran pendant toute la durée du calcul, pouvant ainsi être immédiatement interprétés en temps réel.
Qualité des résultats
Indépendamment de la qualité de la présentation des résultats en trois dimensions sur écran graphique ou de la vitesse des calculs (qui dépendent du post processeur et des performances de la machine), c’est sans nul doute la crédibilité des résultats qui est la plus importante.
Au même titre que pour la plupart des logiciels industriels, il est nécessaire de procéder à un jugement de valeur des outils commercialisés. C’est ainsi qu’aujourd’hui la majorité des fournisseurs de solutions se livrent aisément à des tests de validation industrielle par comparaisons avec des mesures expérimentales.
Bonjour Didier,
un article très intéressant sur la simulation appliquée aux procédés de fonderie.
Sujet que nous travaillons ensemble depuis plusieurs années maintenant et qui donne de très bons résultats et qui permet de valider des concepts/design très en amont et surtout avant l’étape de fabrication
NQ
Bonjour Nicolas et merci pour votre avis tres positif sur l’article de Didier Linxe et sur l’apport du CTIF dans ce domaine. Comme vous, nous sommes convaincu qu’aujourd’hui les outils de simulation numerique sont devenus incontournables pour optimiser très en amont les designs de pièce.
Bonjour.
Je voudrais être orienté vers un logiciel qui me permettrait de concevoir des modèles (noyaux) pour fonderie (alliages d’Alu) par gravité ou, si besoin, par injection sous pression.
Le but est d’obtenir un modèles 3d à partir d’un fichier 3d (stl etc.) du produit finis.
Autrement dit, un logiciel qui ferait le travail des anciens « modélistes » qui fabriquaient leurs modèles essentiellement en bois.
Je pourrais vous envoyer un modèle d’un produit fini en stl si vous me donnez une adresse mail.
Merci sincèrement et joyeuses fêtes de fin d’année.
Smail B.