Le protocole OPC-UA permet des échanges entre machines avec un standard de communication open source indépendant et sécurisé à même de créer ainsi un IoT (Internet of Things) et de répondre aux besoins de l’industrie 4.0. Cet article rappelle le principe de l’OPC-UA et les développements en HPDC (High Pressure Die casting).
OPC-UA, protocole open source
OPC-UA, pour Open Platform Communication Unified Architecture, rendu public et en libre accès depuis 2015, est un protocole de communication d’automatisation industrielle. Il peut faire communiquer entre eux robots industriels, machines-outils, automates programmables, …, capteurs et plus généralement les systèmes d’information de l’entreprise (SCADA, ERP, MES…). La Task force du protocole OPC-UA, pilotée par l’OPC Fundation regroupe un ensemble de près de 900 constructeurs parmi lesquels on retrouve des leaders de différents secteurs (Siemens, ABB AG, Mitsubishi, Buhler AG, …). Ces entreprises aussi bien Européennes, qu’Américaines ou Asiatiques représentent les utilisateurs, les développeurs de solutions (hardware et software) et les centres de R&D. En France, 40 entreprises (AddUp, Cetim, Sepro Robotique, Alstom Group, Staubli, Dassault Systèmes, EDF R&D, …) sont ainsi membres de l’OPC Foundation.
Les prédécesseurs de OPC-UA
OPC-UA avait un prédécesseur appelé OPC Classic. Mais ce protocole basé exclusivement sur des technologies Microsoft empêchait son adoption généralisée. OPC-UA, quant-à-lui, est indépendant de la plateforme utilisée et peut être implémenté aussi bien sous Linux que sous Microsoft, IOS ou Android. Cette indépendance est une meilleure garantie d’adoption, de pérennité et de généralisation future.
Les avantages de OPC-UA
Les avantages de ce standard de communication sont nombreux ; il est ouvert, conçu pour l’interopérabilité, de grands industriels ont déjà implémenté cette norme, il est orienté service (Service Oriented Architecture), il gère la sécurisation des transmissions de données au niveau de l’authentification et au niveau des automates, il offre une large comptabilité au niveau des automates, des IHM (Interface Homme Machine) et des entrées/sorties, il est évolutif et pour finir est compatible avec de nombreux langages de programmation (C++, Java, Python ou .NET). Le site de l’OPC Foundation recense les membres, les développements récents, les webinars sur le sujet ou les sous-groupes (fonderie, plasturgie, …) travaillant sur un métier spécifique.
Le GIMELEC et le Club OPC UA France
Au niveau de la France, depuis fin 2019, le GIMELEC, membre de la Fondation OPC UA, anime le groupe de travail OPC UA France, à travers son Club éponyme. L’objectif de ce club est de « promouvoir et partager les bonnes pratiques autour de la technologie normée OPC UA, laquelle permet l’échange sécurisé et fiable de données en milieu industriel, depuis le capteur-actionneur jusqu’à l’ERP ». GIMELEC insiste sur le fait qu’OPC-UA est indépendant des constructeurs, est évolutif (utilisable sur des systèmes embarqués, sur le Cloud sur des smartphones, …) et structure la donnée.
La normalisation OPC-UA
Au-delà d’être une technologie, OPC-UA est une norme (IEC 62541) et repose sur trois piliers : l’interopérabilité, la cybersécurité et la modélisation, ce qui en fait un outil incontournable pour l’industrie 4.O et l’IoT. L’interopérabilité garantit que OPC-UA puisse être utilisé à tous les niveaux de l’entreprise (du capteur de terrain jusqu’au Cloud) et permette de faire communiquer ensemble des divers systèmes électroniques (automate, bus de terrain, cloud, …). A chaque évolution technologique, OPC-UA se transforme aussi pour prendre en compte ces innovations (5G, 6G, 7G, …) et rester compatible. La sécurité des données est assurée à différents niveaux (authentification et droits d’accès, traçabilité des opérations, chiffrement des données, …).
Les deux mécanismes d’échanges d’informations
OPC-UA intègre deux mécanismes d’échange d’information : le client/serveur et le Pub/Sub. Le client/serveur est utilisé pour l’échange de gros volumes de données (vers un ERP, le Cloud).
En revanche, le Pub/Sub (publish/subscribe) est un mécanisme d’abonnement de machines en amont à des informations de machines en aval et qui consomme peu de ressources. Avec le Pub/Sub, certaines machines s’abonnent aux informations en provenance d’autres machines.
La modélisation des données par le Companion Specification
La grande originalité de la technologie OPC-UA est la modélisation des données par l’intégration de meta-model. On parle de modèle d’information OPC-UA car on définit des interfaces de langage pour que les machines puissent se comprendre entre elles. Pour cela, les données sont structurées afin de pouvoir retrouver la bonne information toujours au même endroit. Dans OPC-UA, est ainsi développé la notion de « companion spécification » qui définit la forme sous laquelle les machines fournissent de l’information. Toute nouvelle machine, pour peu qu’elle intègre l’OPC-UA pour un métier donné, pourra être connectée au reste du réseau d’entreprise avec un faible effort d’interfaçage. Les données qui circulent (paramètres machines, message d’erreur, …) pourront être enrichies avec des données contextuelles à l’entreprise et utilisées par d’autres services (maintenance, qualité, …) ou envoyées si nécessaire à des fournisseurs ou clients extérieurs. Chaque association professionnelle correspondant à un métier industriel peut définir ses companion specification pour les faire coller à ses besoins (unité de fabrication type, …).
HPDC companion specification initiative
La profession de la fonderie sous pression (HPDC pour High Pressure Die Casting) a travaillé sous la forme d’un groupe de travail (GT) sur la définition d’un companion specification adapté à la technologie HPDC. Il peut en effet y avoir jusqu’à 25 périphériques différents autour d’une presse d’injection (Al, Zn, Mg) et il important de pouvoir les faire communiquer avec le protocole OCP-UA dans un format adapté à la profession. A l’heure actuelle, différents protocoles existent qui rendent complexe la communication et l’interfaçage entre machines et périphériques. Pour cela, le GT a travaillé sur la modélisation des fonctions des périphériques. Ainsi, un four doseur a été modélisé par 2 fonctions : la fonction four de maintien de métal liquide et la fonction de dosage métal.
Ces 2 fonctions combinées ont été séparées, ce qui permet de modéliser des unités de production qui comportent 2 périphériques distincts : un four séparé et un louche automatique de dosage de métal. De la même manière, le système de poteyage a été séparé en 3 systèmes : le manifold de poteyage (avec les têtes de poteyage et de soufflage), le système de mélange de produit (eau, poteyage « pur ») et le système de livraison du poteyage. Le GT a également séparé la presse d’injection (HPDC machine) du système de contrôle de l’unité en créant un « Cell Contrôler » indépendant de la presse d’injection. Pour chaque périphérique, des « skills » ou capacité (« open die » ou « close die » par exemple) et des « micro-skills » (« move to position ») ont été définis. Des suites de skills définissent une séquence d’automatisation du process (« open die » + « remove part » + « diespray manifold » + …). Il y a 7 groupes de travail qui correspondent aux 7 grandes fonctions de la fonderie sous pression sur l’unité de production.
Le GT HPDC-OPC-UA
Le GT sur l’OPC-UA HPDC est piloté au niveau de l’OPC Foundation par le VDG (Allemagne) et CEMAFON (Italie) qui représentent les pays leaders de la fonderie sous pression en Europe. L’objectif du GT est de « Développer des specifications pour la communication entre les périphériques de la machine à couler sous pression (HPDC Cell) et entre les périphériques et les systèmes extérieurs à la ligne de production (MES et ERP par exemple). » L’objectif est donc de relier machines et périphériques entre eux et de les connecter avec l’ERP d’entreprise. Ce GT intègre des constructeurs de machine (Frech), de périphériques et des utilisateurs d’unités de production HPDC. Il existe une vingtaine d’autres GT qui pilote également une réflexion métier (plasturgie, robotique, vision industrielle, industrie du verre, fabrication additive, système de mesure, …).
Un Data Lake alimenté par une cellule HPDC OPC-UA
L’institut de fonderie RWTH (Aachen University) a ainsi développé sur une machine 500 tonnes, un data lake pour collecter les informations de process grâce à différents capteurs connectés entre eux via le protocole OPC-UA. Un data lake, dans le Cloud, basé sur « MinIO object store » permet de stocker de manière non structurée, via un pipeline de transfert, des informations techniques de production qui seront utilisées en temps réel ou à posteriori à des fins d’analyse. Conceptuellement, RWTH vise à structurer les données HPDC dans le data lake en trois couches : une couche dite de bronze (données dans leur format original sans transformation importante), une couche dite d’argent (structuration sous forme de tableau avec les paramètres organisés temporellement) et enfin une couche d’or (données directement utilisables pour l’analyse).
Dans le futur, des flux d’images et de vidéos en provenance de la machine (contrôle du trou de coulée, ouverture machine, …) seront sans doute intégrés au data lake. L’utilisation des données du data lake peut, selon le RWTH, être multiple : pour la simulation numérique de processus, pour des outils de visualisation, pour développer des modèles mathématiques ou réaliser de l’apprentissage automatique (Machine Learning).
Un fichier JSON regroupe par exemple des suites de skills développés par le RWTH pour piloter la presse d’injection (fermeture machine, dosage métal, remplissage, refroidissement, extraction de la grappe).
Renault et l’OPC-UA
L’objectif du Groupe Renault est de mettre en œuvre l’utilisation d’OPC UA sur tous ses sites de production dans le monde, et développer un système de communication de données de bout en bout : du capteur, aux machines, vers le Cloud et vice-versa en utilisant la norme de communication OPC UA. Aujourd’hui, OPC UA est déjà utilisé sur 17 des 38 sites de production du constructeur, avec un total de 3 300 machines compatibles avec OPC UA et un stockage des données sur Google Cloud Platform. Les premiers développements ont été réalisés en 2016 sur le site de Valladolid (Espagne).
Le futur du protocole OPC-UA
Au niveau Européen, le parc installé de machines de production est important et les plus anciennes machines et périphériques ne sont pas compatibles avec OPC-UA, ce qui limite actuellement son adoption. Cependant, 17 millions de machines au travers le monde intègrent déjà la technologie OPC-UA. De très nombreux constructeurs équipent leurs nouvelles machines, ce qui permettra d’avoir une compatibilité future. On peut imaginer également qu’en cas de rétrofit du soft des machines de production, il soit pertinent de les rendre connectable à OPC-UA.