Alors que les fondeurs mesurent bien les enjeux techniques et économiques des défauts de type retassures ou microretassures sur la qualité d’une pièce moulée en fonte, leur effet sur la tenue en fatigue est souvent mal apprécié, ce qui peut conduire à les sous-estimer. De plus les essais statiques restent insuffisants pour prévoir le comportement en fatigue. Il était donc important de caractériser la limite d’endurance en traction-compression alternée (R=-1) et en traction ondulée (R=0,1) d’échantillons en fonte GS comportant des défauts de microretassures centrées.
Les défauts de microretassures contrôlés par radiographie
Les défauts ont été reproduits de manière contrôlée sur des éprouvettes coulées en fonte GS à matrice ferritique sans traitement thermique. Les barreaux coulés ont été individuellement radiographiés afin de les répartir selon la taille qu’occupe la microretassure centrée. Quatre catégories ont ainsi été constituées : les éprouvettes de référence (exemptes de défauts observables par radiographie), des éprouvettes avec des microretassures entre 2 et 3 mm de large, des éprouvettes avec des microretassures entre 3 et 4 mm de large et enfin des éprouvettes avec des microretassures entre 4 et 7 mm de large.
Caractérisation par analyse d’images après essais de fatigue
En raison de la difficulté à quantifier la surface réellement occupée par le défaut au moyen de l’examen radiographique, une caractérisation plus précise par analyse d’images a été réalisée après les tests de fatigue. Comme une section polie est nécessaire, on a veillé à retirer un minimum de matière. Un contrôle comparatif des deux faciès de la cassure a permis de conforter la procédure d’étude du défaut où le résultat obtenu du côté de la cassure en creux a parfois été préféré. Les caractéristiques des défauts de microretassures, étudiées au moyen de l’analyseur d’images, ont été établies en tenant compte des défauts plus grands que les nodules de graphite. Ainsi, seules les porosités ayant une taille minimale de 900 µm2 ont été considérées.
L’ensemble des résultats montre que les valeurs de surface cumulée des porosités constituant les microretassures s’échelonnent de 0 à 3,32 mm2. On note également des dispersions par rapport aux classes radiographiques auxquelles elles sont rattachées. En reliant le nombre et la surface cumulée des porosités, on a obtenu une relation très probable (r= 0,92) qui signale que la fréquence de distribution des tailles d’une porosité contenue dans la microretassure reste plutôt constante pour une largeur croissante de celle-ci. Nous n’avons en outre pas détecté de macroretassure franche.
On remarque que la catégorie de référence n’est pas exempte de défaut. Cette dernière comporte au contraire un défaut moyen supérieur à celui de la classe 2 à 3 mm. Le classement radiographique est donc en contradiction avec le contrôle à posteriori fait avec l’analyseur d’images. Ce point pose la question de la précision et de la limite de détection des examens radiographiques pour les très petits défauts. Néanmoins, on remarque que les limites d’endurance relatives aux classes en question s’orientent comme les résultats de la surface cumulée réelle. Par convention, on a donc tenu compte des valeurs obtenues par analyse d’images.
Conditions expérimentales des essais de fatigue
Les essais de fatigue ont été réalisés à une fréquence de 120 à 160 Hz pour une durée de vie de 10 millions de cycles. Pour chaque classe de défaut, 20 éprouvettes ont été testées. Les éprouvettes de fatigue ont été prélevées dans des barreaux bruts de 25 mm de diamètre et 200 mm de longueur et après leur acceptation à la suite de l’examen radiographique, elles ont été usinées au diamètre de 10 mm et rectifiées (Ra 0,8 µm). La composition de la fonte GS est de (C 3,40-3,80 %, Si 2,80-3,30 %, Mn < 0,35 %, S < 0,02 %, Cu < 0,10 %, Sn< 0,01 %).
Résultats des essais de fatigue
A partir des essais de fatigue suivant la méthode de l’escalier (Staircase), on a établi les correspondances pour les quatre catégories de défaut. Le tableau ci-dessous montre l’ensemble des résultats où figurent les limites d’endurance à 50% de probabilité de rupture. En dépit des dispersions relevées et de façon à établir une tendance probable entre la limite d’endurance et la taille du défaut que forme la microretassure, on a calculé les valeurs moyennes des caractéristiques morphologiques principales.
Corrélation très franche en traction compression entre la limite d’endurance et le taux de porosité
Dans le cas de la traction–compression, on met en évidence une corrélation probable à 90% entre la limite d’endurance et le taux de porosité surfacique. Dans les limites de la régression, ce résultat met en évidence qu’une augmentation de 1% du taux surfacique de microretassure réduit de 46 MPa la limite d’endurance.
Corrélation moins nette en traction ondulée
La limite d’endurance en sollicitation ondulée (R=0,1) reste bien supérieure à celle obtenue sous sollicitation alternée. Son évolution en fonction de la gravité du défaut est moins linaire qu’en traction compression. Ainsi, après une forte baisse initiale entre la classe de référence et la classe 2 à 3 mm, l’évolution de la limite d’endurance pour les classes 2 à 3 mm, 3 à 4 mm et 4 à 7 mm traduit une faible chute. Une microretassure dont le taux surfacique atteint 0,8% provoque une baisse qui est néanmoins très forte. A titre d’information, on peut signaler que le rapport des limites d’endurance en traction ondulée (R= 0,1) sur celles obtenues en traction-compression alternée (R=-1) est compris entre 1,2 et 1,6.
Tenir compte des imperfections dans le dimensionnement des pièces
L’analyse de la criticité des défauts de type microretassures répond aux besoins de dimensionnement et de rédaction des cahiers des charges de pièces moulées fonctionnelles. Les limites d’endurance ainsi que les coefficients de réduction de la tenue en fatigue obtenus montrent l’intérêt d’en prendre toute la mesure.
Remerciement à notre partenaire RENAULT pour la prise en charge des essais en fatigue.
Très bon article! Les utilisateurs/acheteurs de pièces de fonderie devraient être mieux sensibiliser à la performance des pièces en fatigue variables d’une fonderie à l’autre. Le choix de la fonderie ne doit pas être seulement une question de coût des pièce. L’audit du procédé de la fonderie est important pour éviter des mauvaises surprises.
L’analyse thermique avancée permet d’évaluer la qualité métallurgique et le risque de microretassure.
Bonjour Yohan et merci de votre avis. Effectivement, le choix d’un sous-traitant doit répondre à un compromis qualité/coût des pièces.
Et l’audit initial de la fonderie permet d’appréhender finement son matériel, ses pratiques, savoir-faire et types de pièces déjà réalisées.
Bonjour,
Excellent rapport qui allie à la fois pragmatisme et intérêt pratique pour le fondeur et le concepteur.
Il est vrai que la mise en évidence de faibles micro- retassures n’est souvent pas très aisée en contrôle gammagraphique sur des pièces massives et épaisses.
Merci pour ce travail. Cordialement.
Bonjour André. Merci pour votre avis sur l’intérêt de notre article sur la criticité des microretassures dans les fontes GS.
Bonjour,
Merci pour cet article contenant des informations très pertinentes sur l’effet des défauts sur la tenue en fatigue d’un alliage métallique (fonte). J’apprécie aussi la démarche scientifique rigourouse mise en place.
Cordialement
Bonjour Driss. Merci d’avoir apprécié notre article. La démarche scientifique rigoureuse fait partie de l’ADN des Experts de CTIF.
Bonjour, actuellement, je mène des travaux de thèse sur l’effet des caractéristiques de la population des pores (moyenne en taille des pores, densité, formes,…) sur les caractéristiques de la limite d’endurance (moyenne, dispersion, effet de volume et de gradient) en FGNC des alliages d’Al de fonderie.
Grâce à vos résultats, je peux affiner mes conclusions scientifiques.
Cordialement
Re-Bonjour Driss. Nous sommes heureux que nos articles vous soient utiles. Nous avons un retour d’expérience important au CTIF sur l’impact des defauts sur les caractéristiques mécaniques sous contraintes statiques ou dynamiques Cela au travers de nombreux travaux pour des industriels de divers secteurs (automobiles, aéronautiques, …) dans des métallurgies assez variées.