Les Giga Presses, une nouvelle technologie pour l’industrie automobile ?

Giga Press de 9000 tonnes pour la production de pièces de structure automobile en aluminium.

Giga Press de 9000 tonnes pour la production de pièces de structure automobile en aluminium.

Les Giga Presses d’injection pour la fabrication des pièces en aluminium commencent à apparaître sur le marché avec Tesla en pointe sur leur utilisation. Cependant, ce type de machines questionne encore les constructeurs automobiles avec des enjeux mais aussi des investissements très importants.

Une demande pour des structures plus légères

Avec le développement du marché des voitures électriques et le déploiement de la 5G qui demandent des pièces de structures plus légères et de grande dimension en alliage d’aluminium ou de magnésium, le procédé de moulage sous pression représente une bonne alternative. Pour s’adapter à l’évolution de ces marchés, la mise sur le marché de presses à injecter le métal « géantes » devient une alternative. D’une puissance jamais produite, les Giga presses, sont également appelées Méga-presses ou encore Dreampress pour les machines les plus grosses (8000 – 9000 t).

De telles presses visent à limiter le nombre de pièces nécessaires à la fabrication d’un véhicule et à raccourcir la chaîne de montage du fait du nombre réduit de manipulations des composants et des coûts de production limités Il serait ainsi possible de fortement réduire les temps d’assemblage et de montage des pièces, autorisant ainsi une diminution de 20 % des coûts de main d’œuvre.

Tesla, le premier utilisateur des Giga Presses

Giga presses - Suppression de l'assemblage de 70 pièces - Model 3 - Tesla Motors.
Giga presses – Suppression de l’assemblage de 70 pièces – Model 3 – Tesla Motors.

Tesla a été le premier constructeur automobile à utiliser la technologie des Giga presses ; le groupe a inauguré sa 4ème Giga Factory au niveau mondial et la 1ère en Europe à Berlin le 22 mars 2022. A terme, cette Giga Factory emploiera 15 000 personnes et produira 500 000 véhicules par an.

Une évolution marquante de conception est en cours chez Tesla concernant la caisse du Model Y : l’emploi de Giga presses permettrait la fabrication du châssis en 3 éléments principaux : les modules avant et arrière en alliage d’aluminium, plus le plancher central. Selon Elon Musk, directeur général de Tesla Motors, cette construction élimine l’assemblage d’au moins 70 pièces, réduit fortement le nombre de robots et évite des problèmes d’étanchéité entre les pièces jointes. Autres bénéfices : un allègement de 10 % et une augmentation d’autonomie de 14 %. Fournie par la firme italienne IDRA, chaque Giga presse pèse entre 410 et 430 t et dispose d’une force de serrage de 55 à 61 MN. Afin d’offrir un temps de cycle d’environ de 90 s, soit près de 1000 cycles d’injection par jour, le système d’injection peut déplacer environ 80 kg d’aluminium dans la cavité de la matrice en 60 à 100 ms.

Tesla utilise un alliage à haute ductilité (8.5 % Si, 0.79 % Cu, 0.27 % Fe , 0.45 % Mn) de type AA386 à bas fer – et non plus un alliage AlSi9Cu3(Fe) traditionnel – pour atteindre des performances en tenue mécaniques idoines. Le process utilise du moulage sous vide dans l’empreinte avec de la micro-lubrification mais sans traitement thermique ultérieur des pièces.

Mais d’autres constructeurs automobiles se positionnent sur ce marché. En effet, début février 2022, Volvo a annoncé qu’il prévoyait d’investir sur son site de Torslanda (Suède) un milliard d’euros en particulier pour installer une Giga Presse destinée à la production de dessous de caisse en alliage d’aluminium pour véhicules électriques.

Un concept qui pourrait s’étendre

Le concept de Giga Presse gagne en popularité auprès de l’industrie automobile, notamment en Chine, où de nombreux constructeurs visent à reproduire cette technologie. LK Technology, fournisseur de presses à injecter chinois a reçu une commande de Wencan Group, pour une machine à injecter d’une puissance de fermeture de 9 000 tonnes, la plus grande machine de moulage sous pression connue à ce jour. Ce nouveau modèle baptisé DreamPress sera un modèle sans genouillères, pèsera plus de 400 tonnes et aura une vitesse au piston annoncée de 12 m/s.

En janvier 2022, la fonderie de sous pression Guangdong Hongtu Technology Co. Ltd. (Chine) a passé commande pour une presse de 6 800 tonnes et une autre de 12 000 tonnes à LK Technology.

L’automobile : la seule industrie à utiliser de telles presses ?

L’industrie automobile n’est pas la seule industrie à investir dans ces Méga presses. En effet, LK Technology a livré une machine Impress-Plus DCC 6000 à GLOVITECH (Corée du Sud), sur son site situé au Vietnam. Cette presse est utilisée pour produire de grandes cages de Faraday pour les stations de base mobiles 5G. La machine a été livrée en décembre 2020 et a produit les premières pièces en mars 2021.

Une technologie qui soulève des interrogations

Deuxième Idra OL 6100 CS Giga Press.
Deuxième Idra OL 6100 CS Giga Press.

Même si les Giga presses ont suscité de l’intérêt dans les secteurs de l’automobile et de la 5G, aucun autre constructeur automobile ne semble à ce jour avoir investi dans des Giga Presses à l’exception de Tesla Motors et Volvo. Cependant, les lignes peuvent bouger…

De l’autre côté du Rhin, les constructeurs allemands ne s’engagent pas. En effet, plusieurs questions se posent comme la question du type de réparation à mettre en place au niveau du châssis en cas d’accident d’un véhicule ou du remplacement ou non de l’ensemble du châssis.

On peut également se poser la question de la nécessité de produire ces pièces, comme le fait actuellement Tesla sur le site de montage des véhicules (dans le cas d’une Giga Factory). En effet, quel serait le coût de transport pour livrer des pièces d’environ 100 kg aux dimensions de 600x1000x1500 mm sachant que Tesla compte produire 500 000 véhicules par an sur le site de Berlin ?

L’avenir de la technologie des Giga Presses

Ces nouvelles presses ne seront pas simples à intégrer. Premier problème : les usines existantes n’ont pas forcément l’espace suffisant pour accueillir de tels « édifices », et les robots ou ponts roulants tout aussi colossaux qui les accompagnent. Il est plus simple de construire l’usine autour des presses. Autre incertitude : le manque de recul sur ces machines et leur taux de rendement synthétique. La maintenance de grosses presses est complexe et leurs pannes peuvent immobiliser des usines entières.

Notons également que bien avant l’apparition des Giga Presses, nous notions déjà une tendance de fond à l’augmentation de la taille des machines d’injection aluminium. Les Giga Presses ne constitue donc pas réellement une rupture, mais bien plutôt une accélération – spectaculaire il est vrai – de cette évolution vers l’augmentation de taille qui permet de répondre au besoin de réaliser des pièces de structure de grande taille pour l’automobile. D’autres technologies de moulage (basse pression contrepression) sont en concurrence pour réaliser de grandes pièces de structure en aluminium.

Les Giga Presses ne remplaceront pas les machines de taille inférieure, mais viendront compléter une gamme dorénavant plus étendue.

Remerciements : José RUIZ, Christine COLLIARD et Patrick HAIRY (co-auteurs).

2 commentaires

  1. Dani dit :

    Bonjour, très bon reportage mais c’est de la colère qui en ressort. En France on avait des industries aluminium qui savait utiliser et concevoir des pièces moulées sur des presses à injecter, presses de plus de 2200t IDRA, et on les à sacrifier. La vraie question, c’est pas le choix des méga presse, mais où en est on avec la production automobile. Il ne restera bientôt que des mega facturie.

    • Le CTIF dit :

      Bonjour Dani et merci de votre intérêt pour notre article sur les Giga Presses. Pour vous rassurer, il existe de très nombreuses fonderies sous pression aluminium en France, même si toutes n’utilisent pas des presses de plus de 2000 tonnes.

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