
Densité et module d'Young comparée des matériaux - Source GrantaDesign.
Les métaux ont des propriétés d’usage (Rp0.2, masse volumique…) intéressantes à comparer avec les autres familles de matériaux (céramique, plastique, composite…) utilisées dans les structures, les objets industriels ou les objets du quotidien. Cet article fait un point entre les différentes familles de matériaux en mettant en lumière leurs avantages et limitations respectifs.
Les diagrammes d’Ashby

Dans un article publié sur le site web Alumatter, intitulé « Comparaison des propriétés », Mike Ashby, professeur Ingénierie des matériaux à l’université de Cambridge a comparé les propriétés mécaniques de différents matériaux (céramiques, alliages métalliques, composites, polymères, bois) en termes de rigidité et de légèreté par un diagramme représentant la courbe du module d’Young par rapport à la densité (Figure ci contre). Cependant, la comparaison des matériaux entre eux suppose souvent que l’on rapporte la caractéristique considérée à la masse volumique car la masse volumique est souvent pénalisante en alourdissant la structure (bâtiment, …) et en augmentant la consommation énergétique (transports). On définit alors la caractéristique spécifique du matériau comme, par exemple sur le diagramme suivant, le module d’Young spécifique E/ρ. Les diagrammes de Mike Ashby rendus accessibles par Granta Design permettent ainsi, grâce au faisceau de droites de pente E/ρ constante, de repérer les matériaux, situés sur chacune de ces droites, ayant le même module d’Young spécifique c’est-à-dire pouvant fournir le même service malgré un dimensionnement plus faible pour le matériau le plus résistant.
Rigidité et légèreté

On constate sur le diagramme, qu’en terme de module d’Young spécifique, les métaux et alliages sont très bien placés, juste en-dessous des céramiques, loin devant les matériaux naturels et les polymères, et très proches des composites. Enfin, au sein des alliages, on peut observer la répartition des différentes familles, les alliages de plomb étant ici les moins bien positionnés, handicapés par leur densité. Les matériaux les plus rigides sont les céramiques, suivies de près par les métaux et les matériaux composites. Le bois et les polymères ont une densité inférieure mais ils sont beaucoup moins rigides. Les aciers, les alliages de titane, d’aluminium et de magnésium, les bois les plus rigides présentent tous une bonne rigidité spécifique (rigidité rapportée à la masse volumique, figure ci-contre) contrairement aux polymères. Ils sont donc à la fois légers et rigides. Les PRFC (Polymère Renforcé de Fibres de Carbone) et les alliages de béryllium sont encore plus performants comme les matériaux céramiques mais ces derniers présentent une certaine fragilité.
Résistance alliée à une faible densité

Pour mesurer la résistance des matériaux alliée à une faible densité, Mike Ashby utilise un diagramme de la résistance par la densité (figure ci-contre). Certains matériaux céramiques semblent être plus résistants que les métaux mais ceci n’est valable que dans le cas d’une sollicitation par compression. Dans le cas d’une sollicitation en traction, les matériaux céramiques sont 10 à 15 fois plus faibles et varient fortement alors que les performances des métaux sont régulières aussi bien en traction qu’en compression. Les matériaux composites peuvent rivaliser avec les métaux en ce qui concerne la résistance et la densité ; le bois et les polymères ont une résistance beaucoup plus faible. Parmi les alliages présentant une excellente « résistance spécifique », figurent les alliages de titane. On notera également que les alliages de nickel qui possèdent tous approximativement la même densité, ont des résistances mécaniques assez variables.
La résistance rapportée au prix des matériaux

Enfin, il est utile dans de très nombreuses applications de tenir compte du prix des matériaux. La figure ci-contre, qui représente la résistance par rapport au prix par kilogramme (prix de base de la matière première sans compter le prix de la main d’œuvre) met en évidence plusieurs points. Tout d’abord, on constate que les métaux et alliages constituent une famille de matériaux située à la fois parmi les plus résistantes et les plus onéreuses. Ensuite, on s’aperçoit que cette famille est toutefois assez diverse en termes de coût. Les fontes, qui présentent des propriétés n’ayant rien à envier aux autres alliages, font partie des alliages les moins chers. Ensuite, les aciers faiblement alliés sont moins chers que les alliages d’aluminium et offrent également des résistances absolues plus élevées. Enfin, la plupart des autres matériaux qui font preuve d’une résistance comparable ou plus importante que celles des alliages d’aluminium sont plus chers (les alliages de titane et les PRFC ont un prix plus de dix fois supérieur au kilogramme). En guise de conclusion, on retiendra que, comparés à d’autres matériaux, les alliages métalliques présentent, entre autres, de bonnes propriétés mécaniques qui contribuent à la performance et à la fonctionnalité du produit fini, critère important du design industriel.
Comparaison des procédés de mise en forme

Il nous a paru intéressant de faire un focus particulier sur les procédés de forge à chaud ou à froid, l’emboutissage, la métallurgie des poudres, l’usinage et la fonderie qui constituent les principales technologies de mise en forme des matériaux métalliques.
Ces procédés sont comparés, dans le tableau ci-contre en termes de série minimale nécessaire à l’amortissement du coût du procédé, de degré d’usinage nécessaire pour finir la pièce, de cadences de production, de complexité de formes, d’intégration de fonctions. Ce tableau est fourni à titre indicatif. En effet, certaines pièces ne pourront être réalisées qu’avec une seule technologie. Par exemple des blocs-moteur réalisés en fonderie sous pression (ou en moulage sable) ne pourraient pas être produits par forgeage. A iso-performances, le critère économique joue évidement un rôle déterminant dans le choix du procédé.
La lecture de ce tableau montre combien chaque procédé de mise en forme des métaux présente des atouts souvent contrebalancés par des handicaps. Le rôle du concepteur ou du designer sera donc de bien peser ces points positifs et négatifs afin de choisir le meilleur compromis. On peut constater que la fonderie peut faire valoir, la plupart du temps, sa capacité à produire des pièces finies à géométrie complexe comme des blocs-moteur sans trop nécessiter d’opérations de finition (usinage, assemblage) et avec une forte intégration de fonctions. Un de ses atouts majeurs réside en effet dans son aptitude à fournir des pièces quasi-finies capables d’intégrer de nombreuses fonctions. Par exemple, la plupart des jantes sont réalisées à bas coût selon le procédé d’emboutissage mais elles ne présentent pas un bel aspect d’où la nécessité de leur adjoindre un enjoliveur. La fonderie, permet de réaliser des jantes en combinant deux fonctions, celle de la pièce mécanique et celle de l’enjoliveur. Le coût d’une jante coulée en fonderie est certes supérieur à celui d’une jante emboutie avec son enjoliveur mais pour des raisons d’esthétisme, la version moulée est parfois préférée.

Prenons un autre exemple, les bornes de location de vélo. La fonderie Barbas & Plailly a réalisé les bornes de vélo de première génération à Vienne, puis celles de Lyon, Marseille, Séville. Les premières, réalisées pour la ville de Vienne, étaient usinées. Ce n’est plus le cas aujourd’hui. Elles évoluent vers une intégration de fonctions de plus en plus forte. Cette fonderie a fourni une production « clé en main » de bornes de vélo entièrement montées (toutefois sans l’électronique). Elle assure donc le moulage, la peinture et le montage. En travaillant avec le bureau d’études de JC Decaux, elle a intégré des inserts métalliques dans les pièces moulées des bornes qui dispensent des travaux d’usinage. D’ailleurs, ses autres clients demandent de plus en plus d’intégrer des fonctions et de réduire ou éliminer l’usinage.
Les matériaux métalliques : un bel avenir devant eux
Les procédés de fonderie sont bien placés par rapport aux autres procédés de mise en forme des matériaux en termes de complexité de forme et d’intégration de fonctions. La fonderie laisse libre cours à l’imagination et à la créativité du designer, de par la liberté de forme qu’elle autorise.
Les matériaux métalliques ont également un bel avenir devant eux. Grâce à leurs propriétés physiques, chimiques et mécaniques, ils présentent un avantage pour le designer sur le plan esthétique, fonctionnel, ergonomique, écologique, économique et technologique. Avec l’intérêt croissant pour l’éco-conception et le développement durable, ils constitueront sans doute les matériaux de demain en raison notamment de leur forte recyclabilité et de leur durabilité.
Extrait de l’ouvrage Le design fond pour le métal, Editions ETIF.