Pour les compagnies aériennes, les frais de carburant représentent actuellement le premier poste de coût (devant les frais de personnel); l’allègement des structures aéronautiques est donc clairement un enjeu majeur et peut se faire soit par la substitution par des matériaux différenciants (mais souvent très onéreux et à faible maturité technologique) soit, et à moindre coût, avec des couples matériau/process mâtures utilisés à leur limite par l’optimisation du design des pièces (optimisation topologique) et par l’utilisation de technologie de fabrication en rupture (fabrication additive).
Les difficultés de réalisation
La pièce Éole est une trappe de maintenance aéronautique en aluminium moulée obtenue par le procédé de cire perdue. La principale difficulté dans la réalisation de cette pièce était l’obtention d’une fine toile de grande dimension (2 mm d’épaisseur sur une surface de 700 x 400 mm) accrochée à une structure organique intégrant des fonctions multiples (mécanisme de fermeture/ouverture, butées, joint d’étanchéité, fixation…).
Les outils numériques mis en œuvre pour l’optimisation du design
Le développement et la réalisation de la pièce ont fait appel à de nombreux outils numériques. Tout d’abord, la phase de conception a nécessité la mise en œuvre de Catia V5 pour la CAO et d’OptiStruct pour l’optimisation topologique. Ensuite, les logiciels QuikCAST et ProCAST ont été déployés pour la simulation du process fonderie.
La simulation du remplissage de la grappe de coulée donne l’évolution de la température en cours de remplissage, ce qui permet d’appréhender les risques de non-venue (métal qui se fige prématurément et qui ne remplit pas complètement la pièce), notamment au niveau du panneau extérieur de la porte (toile de 2 mm). La simulation de coulée ne met pas en avant de problème de remplissage et permet ainsi de valider le dispositif.
La simulation de la solidification de la grappe de coulée permet d’observer l’évolution de la faction solide de la pièce avec la présence de poches de métal liquide dans les raccordements entre le panneau extérieur et la structure organique. Ces dernières zones de solidification étant alimentées par les canaux de coulée placés en vis-à-vis, les défauts de type retassure dans la pièce sont écartés.
Les verrous techniques à la fabrication en fonderie cire perdue
La fabrication par le procédé cire perdue présentait plusieurs challenges : réaliser un modèle perdu en résine (l’équivalent d’une cire) de forme très complexe et de grande taille, éliminer ce modèle par voie thermique, produire des grappes en céramique suffisamment solides lors de la coulée et rigides afin d’éviter la déformation de la pièce au moulage. La grande taille de la pièce (700 mm) et la complexité de la géométrie excluaient l’utilisation d’une cire injectée directement. Le choix d’un modèle en résine polymère (à la place d’une cire traditionnelle) réalisé par impression 3D a été retenu.
Un démonstrateur à échelle réduite pour tester des solutions
Avant de passer à la réalisation de la pièce échelle 1, il a fallu s’assurer que les nouveaux matériaux associés aux techniques de fabrication additive permettaient cette réalisation en fonderie. Pour cela, un démonstrateur à échelle réduite (un morceau de porte représentatif) a été réalisé en plusieurs épaisseurs (de 1.9 mm à 2.1 mm) selon 2 technologies: un modèle PMMA (polymère polyméthacrylate de méthyle) infiltré de cire obtenu par frittage de poudre selon la technologie Voxeljet et un modèle nid d’abeille en résine photosensible obtenu par stéréolithographie (Materialise).
Des tests de brûlage (élimination de la résine) en autoclave et au four flash ont été réalisés sur ce modèle réduit sur plusieurs moules (carapace en céramique) et ont permis de valider la mise en œuvre utilisé ultérieurement pour la porte à l’échelle 1. Le choix final s’est arrêté sur le modèle en PMMA, le critère discriminant étant la fissuration voire la rupture des carapaces.
Calculer les déformations de pièce
Afin d’appréhender les déformations de la pièce lors de la coulée (contraintes thermomécaniques), des calculs sous ProCAST ont également été réalisés sur le démonstrateur à échelle réduite. Les résultats de calcul ont été comparés à la géométrie 3D issue d’un scan de la grappe de coulée et à la géométrie CAO nominale de la pièce avec une bonne corrélation entre les deux. Cette démarche a permis de prédire les déformations sur la pièce à l’échelle un et de garantir des valeurs conformes.
Le modèle de la porte a pu être ensuite imprimé en 3D et monté dans une grappe de coulée (avec le système d’alimentation) pour subir les opérations successives de moulage (trempage du modèle dans une barbotine, stucage, séchage), de brûlage du modèle, de frittage de la carapace et de coulée de l’alliage d’aluminium (AlSi7Mg0.6).
30 % de gain de masse pour des grandes structures
Cette réalisation, présentée au dernier salon du Bourget, laisse envisager une réduction de 30% de la masse, une réduction des coûts, et une adaptabilité du design et de la fabrication pour les prototypes et la fabrication série, transposable à des structures de taille supérieure. Seule l’association de la fabrication additive pour l’obtention du modèle perdu et de la fonderie cire perdue aluminium a permis une telle prouesse technologique, ouvrant ainsi la voie à de nouvelles applications industrielles.
Remerciement à nos partenaires de choc SOGECLAIR Aerospace (leader du projet), Ventana et Voxeljet sur ce très beau projet qui a remporté le trophée 3D PRINT 2018.
CTIF a réalisé la fonderie ? J’ai longtemps cherché un fondeur capable de tirer des protos sur la base de cire perdue imprimée en 3D… Peu d’entreprises jouent le jeu pour tester ces nouveaux procédés….
L’étude de faisabilité en process fonderie a été menée entièrement par CTIF. Pour valider ses conclusions, des essais de coulée en carapace des parties les plus complexes de la pièce (le démonstrateur décrit dans l’article) et des simulations de déformation ont été réalisées par CTIF. Par contre, la coulée de la pièce entière a été réalisée par Ventana à partir d’un modèle imprimé par Voxeljet, la pièce étant trop grande (700 x 400 mm) pour nos moyens d’essais.
Bel exemple d’optimisation topologique – Visiblement vous avez utilisé la VX1000 et la Mammoth ?
Bonjour Alex. Merci pour votre commentaire. Oui nous avons effectivement utilisé les 2 technologies, la machine VoxelJet VX1000 pour l’impression 3D du modèle résine PMMA qui a permis la réalisation de la pièce en fonderie cire perdue et la machine Mammoth de Materialise pour la réalisation d’une maquette de la porte à l’échelle 1 en stéréolithographie (SLA).
J’ai travaillé sur un collecteur d’admission automobile en impression PLA en partenariat avec l’ENSAM de Lille. Une étude a été menée afin de substituer le PLA a ma cire de coulée. Les tests et essais ont été concluants sur les modèles test. Mais j’ai rencontré également le problème de dimension pour le prototype final sans pouvoir trouver d entreprise pour tester le PLA a la place de la cire.
Bonjour Thierry. La dimension des pièces en fonderie cire perdue est une vraie problématique et trouver des fondeurs en capacité de réaliser des pièces de grande dimension n’est pas simple, surtout avec des exigences de qualité (pas de défauts de santé matière) et de tolérance dimensionnelle. Si vous souhaitez aller plus loin dans le développement de votre pièce et rechercher un fondeur capable de la produire, sachez que CTIF peut vous accompagner dans cette démarche.
Conception et optimisation par SOGECLAIR aerospace
Bonjour Germain. Oui, tout à fait, merci de votre précision.
[…] le FDM (dépôt de fil) de Mega3D. Tous ces procédés possèdent des avantages et des limitations en termes de taille de pièces réalisables, de précision dimensionnelle, de productivité et de coût. Le PPMA de Voxeljet en particulier est […]
Bonjour
En réponse au commentaire de M. Dugrain , Howmet CIRAL réalise ce genre de pièces en alliages d’aluminium à partir de modèles stereo depuis 1992, en qualité Aéro.
A votre disposition pour « jouer le jeu « !