La fonte GS et ses caractéristiques

Inoculation de la fonte GS - four de fusion.

Inoculation de la fonte GS - four de fusion.

La fonte GS offre une très large gamme de propriétés mécaniques. D’autres fontes sont également disponibles : fonte à matrice ferritique renforcée, fonte SiMo, fonte NiHard, fonte vermiculaire.

Les fontes pour applications mécaniques

Les fontes grises couvrent une gamme de résistance à la traction allant de 150 à 1400 MPa : avec les fontes grises lamellaires jusqu’à 350 MPa, et au-delà avec les fontes GS. Au-delà de 900 MPa de résistance à la traction, il est –souvent- nécessaire de recourir à des teneurs modérées en éléments d’alliage –nickel et molybdène- et un traitement thermique.

Pour ces fontes GS dites aussi « ductiles », l’augmentation de la résistance mécanique –limite d’élasticité, résistance à la rupture- va de pair avec une diminution de cette ductilité. Les fontes GS « traditionnelles » proposent une gamme de limites d’élasticité de 220 à 600 MPa avec un allongement à rupture qui diminue de 20% jusqu’à 1% à mesure que la résistance augmente.

Les fontes à matrice ferritique renforcée

Les fontes GS dites à matrice ferritique renforcée normalisées depuis 2010 et qui sont de plus en plus utilisées, proposent des limites d’élasticité de 350 à 470 MPa avec des allongements à rupture de 18 à 10%. Il faut noter que la nodularité (la proportion de sphéroïdes de forme VI et V selon la norme EN945-1) est un facteur déterminant dans l’obtention de cet allongement, cette nodularité étant obtenue en respectant des conditions précises d’élaboration.

La fragilité des fontes

La réputation de fragilité qui a accompagné les fontes tout au long de leur  développement reste toujours tenace. Jugées par un test rudimentaire voire primitif (l’essai de Charpy),  les fontes GS restent certes « fragiles » au sens où elles présentent des énergies de rupture à -40°C de l’ordre de 12 J, là où un acier de résistance équivalente présente des énergies de 100 J voire même plus. Toutefois, jugées sur leur ténacité (comme étant la vitesse de propagation d’une fissure préalablement amorcée), les fontes GS sont loin d’être ridicules face aux aciers, avec des valeurs de ténacité identiques et même supérieures à basse température.

L’impact des particules de graphite sur la propagation des fissures

Pièce en fonte de grande dimension pour l'éolien.
Pièce en fonte de grande dimension pour l’éolien.

C’est la présence de particules de graphite qui gênent les fissures dans leur propagation, qui explique en grande partie, cette meilleure ténacité. Ce niveau de performance a autorisé la fabrication de pièces massives en fonte pour l’éolien, leur utilisation permettant un gain de masse conséquent par rapport à l’acier. La tenue en fatigue des fontes GS est également relativement améliorée, également du fait de la présence de particules de graphite finement dispersées. Les rapports d’endurance (rapport de la limite de fatigue à la résistance à la rupture) sont de l’ordre de 0.4 pour les fontes GS.

Les fontes à graphite vermiculaire

Entre les fontes GL et GS, on trouve les fontes à graphite « vermiculaire », sensées présenter les avantages (mais aussi les inconvénients) des deux types de fonte. Elles ont trouvé leur application « phare » pour les blocs-cylindres de moteurs thermiques haut de gamme, avec un compromis entre résistance mécanique, conductivité thermique et absorption des vibrations.

La modification de la matrice par ajout d’éléments d’alliage

Si les fontes grises à graphite lamellaire ou sphéroïdal évoquées jusqu’à présent représentent la plus grande partie des fontes utilisées pour des applications mécaniques, des utilisations particulières peuvent être envisagées en modifiant les caractéristiques de la matrice avec des éléments d’alliage (silicium, molybdène, nickel, …).

Le silicium dans les fontes

Au premier rang de ces éléments se trouve le silicium, dont l’introduction à une teneur plus importante permet d’améliorer la résistance à l’oxydation de la fonte tout en augmentant la limite d’élasticité.  Des teneurs élevées en silicium (vers 14%) permettent d’obtenir une très bonne résistance à la plupart des acides minéraux et organiques.

Les fontes SiMo et NiResist

Fonte SiMo - micrographie.
Fonte SiMo – micrographie.

Conjointement à l’addition de silicium, celle de molybdène (fontes dites « SiMo ») permet d’améliorer la tenue au fluage des fontes et autorise ainsi leur utilisation sur des pièces comme les collecteurs d’échappement et les carters de turbine pour moteurs thermiques.

Pour des conditions de fonctionnement encore plus sévères –tenue à la corrosion en eau de mer, oxydation à haute température-, le nickel éventuellement associé au chrome est ajouté jusqu’à des teneurs relativement élevées –jusqu’à 30%. Les fontes correspondantes (dont certaines sont désignées sous la désignation commerciale « NiResist ») peuvent être utilisées jusqu’à des températures de 950°C.

Les fontes blanches

Enfin, à côté des fontes grises évoquées jusqu’ici –fontes à graphite lamellaire ou sphéroïdal-, se trouvent les fontes blanches dans lesquelles le carbone en excès précipite lors de la phase eutectique de la solidification sous forme de carbures de fer. En raison de leur grande dureté, ces matériaux sont destinés à des applications de résistance à l’usure, à l’oxydation et aux températures élevées. Ces fontes peuvent être plus ou moins alliées avec des éléments comme le chrome, le nickel et le molybdène.

Les fontes NiHard et au chrome

Les fontes légèrement alliées au chrome et au nickel –désignées sous la désignation commerciale NiHard- présentent une microstructure constituée de carbures mixtes de fer et de chrome, dans une matrice martensitique obtenue brute de coulée. Plus alliées, les fontes dites « au chrome » -la teneur en cet élément peut en effet être élevée : jusqu’à 30%- sont utilisées comme plaques de blindage dans les broyeurs de minéraux ou dans les zones chaudes des incinérateurs, avec d’excellentes  tenues à l’usure et à l’oxydation à des températures aussi élevées que 1050°C.

La mise en œuvre des fontes

Les fontes sont mises en forme par moulage sable traditionnel. Son principal avantage, déjà signalé, est de –relativement- peu solliciter thermiquement le matériau du moule, qui peut ainsi être réalisé en sable de quartz bon marché. Le moulage sable et la faible température de solidification autorisent une grande variété de formes utiles et/ou complexes.

Le moulage en moule métallique de la fonte est également possible, pour les mêmes raisons, lorsque les volumes de pièces à produire sont suffisants pour justifier un outillage métallique. Les pièces de forme cylindrique (chemises moteur, tuyaux d’adduction d’eau) sont évidemment à part, l’outillage métallique en question étant simple à réaliser (lui-même souvent en fonte grise lamellaire)  et la coulée pouvant se faire par centrifugation, ce qui garantit un contrôle précis des épaisseurs et une microstructure fine.

Les germes dans la fonte

Quelle que soit la mise en forme, la caractéristique principale des fontes grises étant de présenter une structure composite fer-graphite, il est donc essentiel que la précipitation de ce graphite puisse se faire même lorsque la vitesse de solidification est élevée (pièces minces ou coulée en moule métallique). De manière tout à fait analogue à la cristallisation de l’eau ou la condensation de sa vapeur, l’apparition d’une nouvelle phase (ici le graphite) dans un milieu homogène (le fer liquide) nécessite l’existence de germes, particules solides de petite taille, qui vont servir de support pour la nouvelle phase.

L’hérédité des fontes

Ces germes existent naturellement, il peut s’agir de fragments de matière réfractaire (provenant des revêtements des fours ou des poches), de particules de graphite présentes dans les pièces en fonte refondues qui ont résisté à la fusion, de diverses impuretés (oxydes, sulfures)… Toutefois la densité de ces germes reste faible et surtout, variable en fonction des conditions d’élaboration –matières premières enfournées, surchauffe… C’est l’une des explications de la fameuse « hérédité » des fontes, c’est-à-dire la tendance à produire une fonte « grise » à partir de fontes elles-mêmes « grises » : les particules de graphite présentes dans ces fontes « survivent » dans le bain de fusion et servent de germes pour la cristallisation du « nouveau » graphite, qui est ainsi facilitée.

L’inoculation de la fonte GS

Produit inoculant pour fonte GS.
Produit inoculant pour fonte GS.

Toutefois ces germes naturels peuvent ne pas être en densité suffisante, si la vitesse de solidification est élevée. La seule solution industriellement suffisamment robuste pour pallier à cette densité de germes naturels fluctuante, est de disséminer dans la fonte liquide une densité élevée de germes artificiels, grâce à un traitement spécifique : l’inoculation. Artificiels, ces germes n’auront qu’un temps limité d’existence mais en ajustant leur composition et en les introduisant au moment optimal, leur durée de vie sera suffisante pour obtenir le résultat recherché. L’inoculation peut être contrôlée par analyse thermique.

Une technique d’inoculation utilisée dans d’autres métallurgies

Cette technique d’inoculation est également utilisée pour affiner la structure de solidification des aciers ou des superalliages, et s’apparente à la modification des alliages d’aluminium qui permet d’affiner la structure de l’eutectique Al-Si. Les produits pour l’inoculation sont caractérisés par une composition et une forme, adaptées chacune à la durée de vie des germes –elle-même fonction de l’épaisseur de paroi de la pièce et son temps de solidification- et le moment où l’inoculation est effectuée : le produit peut être ajouté sous forme de poudre relativement grossière dans la poche de coulée, injecté sous forme de poudre fine dans le jet de coulée, ou placé sous forme de lingotin massif dans le système de coulée.

Une densité élevée de particules dans la fonte GS

L’inoculation est d’autant plus importante en fonte GS, qu’il n’y a qu’un nodule de graphite par germe, alors que dans le cas des fontes GL, un germe fait apparaitre une cellule de solidification, qui contient plusieurs particules de graphite. Une densité élevée de particules de graphite est la garantie d’une répartition plus homogène des contraintes au sein du matériau ; le graphite étant le point faible, un plus grand nombre de  particules conduira à une contrainte subie individuellement par chaque particule, plus faible avec pour conséquence d’augmenter la limite d’élasticité et la ductilité. Les particules de graphite étant un obstacle à la propagation des fissures de fatigue, la limite d’endurance sera également augmentée avec une plus grande densité.

La fonte GS en concurrence de l’acier ?

Les propriétés essentielles des fontes sont dues à la saturation de la matrice de fer en atomes de carbone, et à la relative mobilité de ces atomes. Une propriété non évoquée et pouvant apparaitre comme surprenante, est la capacité des fontes à « dévorer » une pièce en acier avec laquelle elle est mise en contact, si la température est suffisante et ce, par simple diffusion du carbone associée au gradient (suivant l’une des lois de Fick…). Cette propriété est tout à fait à l’image de la tendance actuelle, qui voit les fontes utilisées dans un nombre croissant d’applications en remplacement de l’acier de caractéristiques mécaniques de traction équivalentes, partout où les critères de coût et d’allégement sont mis en avant.

Toutefois la tendance est aussi de placer judicieusement « le bon matériau au bon endroit ». Plutôt que de se concurrencer, fonte GS et acier peuvent aussi s’associer. La soudure mixte fonte–acier est ainsi industriellement mise en œuvre dans de nombreux domaines.

3 commentaires

  1. Blog particulièrement instructif!
    Quand on parle d’allègement par rapport aux moulages en acier, parle-t-on principalement de la moindre densité des fontes GS, ou est-ce-que certaines propriétés des fontes GS (résistance en fatigue?) permettent de redessiner les pièces avec des sections plus minces?

    • Le CTIF dit :

      Bonjour Franco et merci pour votre intérêt pour nos articles de MetalBlog. Effectivement, l’allègement peut venir des performances mécaniques des fontes par rapport à une pièce en acier davantage que de la densité de la fonte.

  2. Nogier dit :

    Bonjour,
    L’ayant vécu, je pense que la maturation de la fonte gs est un point caractérisé et important pour les processus de fabrication ultérieurs

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *