L’utilisation couplée du scan3D, de la fabrication additive et de la fonderie cire perdue a permis de reproduire une œuvre d’art. La tablette Idalion, en bronze antique, d’une grande valeur historique, a ainsi mis à contribution toutes ces technologies au sein d’un travail collaboratif.
Une tablette en bronze très rare
La tablette en bronze dite « tablette Idalion », dont l’état de conservation est parfait, mesure 21,4 cm de haut sur 14 cm de large pour une épaisseur variant de 4 à 6 mm. Les mots (ou les groupes de mots) sont séparés par un petit trait vertical. Le texte est gravé sur les 2 faces et la tablette comprend une poignée.
On mentionne seulement deux autres exemples de tablettes inscrites sur du métal de cette période. En effet, la plupart des tablettes utilisées fréquemment pour des documents et qui n’étaient pas destinées à une conservation prolongée, étaient en bois ou en argile. Cette tablette est un document unique, d’un grand intérêt tant pour l’histoire antique que pour l’épigraphie : c’est en effet le texte le plus long rédigé en écriture syllabique chypriote et c’est cette plaque qui permit au duc de Luynes d’identifier cette écriture.
L’histoire de la tablette IDALION
La tablette Idalion, bronze antique trouvé en 1850 dans la ville antique d’Idalion à Chypre, a été réalisée vers 470-480 avant JC. La tablette est couverte sur ses deux faces d’alphabet grec chypriote avec seize lignes au recto et quinze au verso. Le texte se lit de droite à gauche. Il s’agit d’un décret passé entre Stasikypros, roi de la cité-royaume d’Idalion (moderne Dali, Chypre), et le médecin Onasilos (et ses frères).
Par ce texte, consigné sur la tablette, le roi et la ville s’engagent à régler les honoraires médicaux pour les soins apportés aux blessés lors du siège de la ville par les Perses et leurs alliés, les Phéniciens. Le médecin recevra plusieurs terrains appartenant au roi, dont la possession lui est assurée à perpétuité, pour lui-même et ses descendants. La tablette était conservée dans le temple d’Athéna, sur l’acropole de la cité, qui fut probablement détruite peu d’années après, lors de la prise de la ville par les Phéniciens de Kition.
Reproduire la tablette et en restituer un fac-similé à Chypre
La tablette Idalion a été achetée à Chypre par un collectionneur français, Honoré Théodoric d’Albert duc de Luynes, amateur d’archéologie et qui travaillait au déchiffrement de l’écriture chypriote. Il a cédé la tablette en 1862 à la BNF (Bibliothèque Nationale de France) en même temps que ses collections de monnaies et d’antiquité.
Cette tablette est donc absente des collections du musée Idalion à Chypre. L’objectif du projet était de reproduire le plus fidèlement possible cette pièce historique afin d’en remettre un fac-similé à Chypre.
Les étapes de la reconstruction
La tablette ayant une valeur culturelle et historique très importante, le contact physique pour un contre-moulage n’était pas autorisé. La tablette a donc été numérisée en 3D (50 µm de résolution), reconstruite en 3D (Catia), et son alliage analysé par la méthode PIXE (rayons X). La composition de l’alliage de bronze est 96.5 % de cuivre, 2.4 % d’étain et 0.8 % de plomb. La teneur en cuivre très élevée est sans doute liée au fait de la très forte disponibilité de cuivre sur l’île méditerranéenne.
Un rendu réaliste a été ensuite réalisé avec le logiciel Virtuelium. Puis une cire a été réalisée en prototypage rapide avec une imprimante 3D à partir de la CAO de la tablette et en particulier des écritures en surface. Cette cire a ensuite été utilisée pour réaliser le moulage final de la tablette Idalion par le procédé de fonderie cire perdue.
La fonderie en cire perdue
Le modèle en cire, réalisé par impression 3D, a été assemblé avec un système d’alimentation pour constituer une grappe de coulée. Une carapace en céramique a ensuite été réalisée (par trempages successifs dans une barbotine et stuccage). La cire ensuite été éliminée (décirage en autoclave), puis la carapace a été frittée. Le bronze avec la composition de la tablette originale a été élaboré sur mesure et la pièce été coulée et parachevée (séparation du système de coulé) à la fonderie de CTIF.
Le fac similé offert à Chypre
La copie de la tablette originale (conservée par la BNF à Paris) a été offerte à Chypre et était l’occasion d’une cérémonie pleine d’émotion lors du Congrès Euromed à Chypre. Le fac-similé de la tablette est déposé au musée local de Dali (ville sur le site de la ville antique d’Idalion) à Chypre. Les fichiers CAO ayant servis à la reproduction, ont été ensuite restitués à la BNF pour empêcher toute reproduction frauduleuse de la tablette Idalion.
Remerciements à nos partenaires : la BNF (Bibliothèque Nationale de France), l’Ecole centrale de Paris et le C2RMF (Centre de Recherche et de Restauration des Musées de France).
Magnifique travail ?????
Bonjour Nassim et merci de votre commentaire sur les travaux réalisés au cours de ce projet.